Signifiant « en douce, en cachette », cette expression bruxelloise empruntée au flamand désigne désormais une brasserie. Un fait marquant puisque Bruxelles ne compte que deux brasseries implantées sur son territoire (Cantillon et de la Senne). Surtout quand on retrouve deux jeunes passionnés aux fourneaux et qu’ils nous ouvrent les portes de leur métier de rêve. Denys Van Elewyck et Samuel Languy sont colocataires et maintenant partenaires d’une aventure brassicole. Le résultat: la Curieuse Neus, une blonde au goût prononcé qui deviendra 100% belge et surtout 100% bruxelloise dans peu de temps!
Quels sont vos parcours avant d’avoir eu l’idée de vous lancer dans la production de bières?
Denys: J’ai commencé l’archéologie à l’ULB en 2007 et j’ai terminé en 2012. J’ai ensuite cherché un emploi dans ma branche pendant deux ans mais j’avais l’envie de lancer une brasserie depuis 2011. Mais c’était super important que je trouve quelqu’un de confiance et disponible 24h/24 pour m’aider, donc pas des simples potes. On y a réfléchi en 2013 avant de se lancer cette année.
Samuel: J’ai étudié le game design et la gestion de production pour une haute-école française spécialisée qui a un campus international en Inde. Mais je n’ai jamais terminé ces études et j’ai juste passé les deux premières années. Je suis revenu en Belgique pour faire mes stages et le studio dans lequel je les effectuais m’a proposé du travail tout de suite. J’ai accepté leur offre et j’ai donc travaillé environ trois ans chez Fishing Cactus, à Mons. On avait notre plan bien défini vers janvier de cette année, et je donnais simplement un coup de main. L’idée s’est développée et tout a été correctement lancé vers mars-avril.
D’où vous vient votre amour de la bière, et de sa fabrication?
Denys: Quand on aime la bière, on s’y intéresse de plus en plus pour finalement se demander comment on la fabrique. C’est beaucoup plus compliqué qu’on ne le pense, avec une version facile et une difficile. Facile car il suffit de brasser une journée pour essayer une recette puis d’attendre simplement que la bière soit prête. Mais après, tu cherches à te perfectionner et j’ai donc franchi les portes de la haute-école Meurice pour me former et j’ai découvert que c’était très complexe, avec un mélange de bio-chimie et de créativité.
Samuel: Je me souviens être tombé dedans petit, comme beaucoup de Belges. J’avais dans les quatorze ans et ça m’arrivait de goûter une Kriek en terrasse avec mes parents. Puis quand on est étudiant, on s’intéresse plus aux spéciales et aux bières plus fortes, on écume les night-shops pour acheter des bières qu’on veut goûter. Après on a voulu essayer d’en faire nous-même, avec des premiers résultats pas terribles. On mangeait presque du pain, c’était très alcoolisé et très sucré. Mais le côté « fait maison » nous donnait déjà énormément de plaisir, comme quand on cuisine soi-même.
Comment vous procurez-vous vos matières premières?
Denys: On avait déjà nos stocks personnels pour commencer mais il nous fallait plusieurs grains différents pour tester et équilibrer notre recette. De base, on sait voir si la bière est trop sucrée ou amère et arranger ces aspects, sans oublier qu’il faut à chaque fois attendre quelques mois avant de pouvoir goûter le résultat. On voulait rapidement acheter toutes nos matières premières en Belgique, et on a commencé par 750 kg de grains pour environ trois mois de brassage. Pour le houblon, on se fournit sur la côte flamande, avec un houblon anglais pour l’instant mais qui deviendra belge lorsque la récolte sera finie. Notre levure est standard pour une bière triple et nous utilisons de l’eau bruxelloise, traitée pour être plus douce.
Quels sont vos plans pour le futur de votre brasserie?
Samuel: On a commencé la visite de locaux pour s’installer et on pense avoir trouvé un chouette endroit dans les Marolles, qui a de la place et une vitrine qui permet aussi d’avoir un espace de vente et de dégustation. On cherche également des financements pour payer les avances du local mais aussi le temps d’attente de la première grosse production avant la vente. Notre avantage pour convaincre différents interlocuteurs, c’est que nous avons déjà le matériel et des bières produites, donc on peut arriver autour de la table avec plus qu’un simple « bonjour, on aimerait faire de la bière ». En restant artisanal et distribué plus localement, en vente directe, on pourra se permettre plus d’expérimentations. On aimerait bien proposer une gamme plus large et innovante rapidement, avec une grosse dizaine de bières différentes.