Epiclèse - Vol. Alcool : 6,5%
Pitch:
Brasser de la bière dans une église est certainement une activité insolite qui n'est pas donnée au premier venu. C'est pourtant le pari fou que se sont lancés Hans Dusselier et son fils Victor depuis qu'ils ont racheté en 2017 l'église du sacré-cœur à Kwatrecht dans la commune de Wetteren. Ils distribuent des vins biologiques et du saké "Junmai" japonais depuis 2005 et ont donc décidé de rajouter une corde à leur arc grâce à la production et la vente de bières. Avec déjà une saison, une double et une triple à leur actif, ils enrichissent leur gamme avec des bières vieillies en fût de chêne suivant un processus de fermentation naturelle et/ou avec des levures sauvages. Cette fois-ci, la brasserie "Heilig Hart" a brassée une bière vieillie en amphores ! Et ce n'est pas sans raisons car l'amphore a été l'un des récipients les plus utilisés à travers les époques. Que ce soit chez les Sumériens, les Phéniciens, les Egyptiens, les Romains ou encore les Chinois, l'amphore a servi de tout temps pour la fermentation, le stockage, et le transport de denrées. Ce n'est d'ailleurs pas la première brasserie à s'être prêtée à cette expérience. Cantillon avait déjà fait vieillir son lambic dans une douzaine d'amphores. La brasserie italienne "Birra Del Borgo" avait fait de même avec l"Etrusca", une bière à base de gentiane, raisins sec et miel qui rend hommage aux étrusques, un peuple de la péninsule italienne qui fermentait ses bières dans de gigantesques amphores à l'âge de fer. Ici, l'Epiclèse a été brassée avec un ajout de mout de raisin (cépage Gamay) du domaine "La Dernière Goute", ce qui a permis de procurer les levures nécessaires à la fermentation spontanée en amphores de 800 litres. Elle a poursuivi son voyage en amphore de 500 litres, cette fois accompagnée du premier brassin réalisé dans la brasserie. L'ensemble a été à nouveau vieilli dans une autre amphore de 500 litres et a terminé sa maturation pendant quatorze mois en fût de chêne.
Dégustation:
Le service de la bière débute par une effervescence marquée mais éphémère, accompagnée d'une légère écume mousseuse qui vient distraire l'attention. Malgré quelques timides bulles qui viennent troubler la sérénité de la bière, la robe révèle son caractère étincelant, brumeux et imperturbable. Sa couleur vive ocre rouge, parsemée de reflets cuivrés, appelle à l'olfaction. Les premiers arômes tendent vers des parfums de quetsches, de cerises et de raisins rouges. Le passage du second nez nous mène vers des notes plus lointaines d'agrumes comme le pamplemousse et le côté sucré de l'orange sanguine. L'ensemble est assez vineux et se rapproche d'un rosé bien frais voir même d'une sangria. Le vieillissement semble avoir porté ses fruits, car des vapeurs de terre glaise viennent enrober cette belle richesse aromatique. L'inauguration gustative est douce et acidulée, portée sur le fruit rouge avec la groseille et l'airelle en primeur. Le côté "wild" des levures vient se développer en longueur et complexifier la bière. Le final est sûre, tannique et sec. L'arrière-goût persistant provoque une rétro-olfaction terreuse avec une connotation d'argile. Outre l'ajout de mout de raisin, le vieillissement prolongé et multiple en amphore semble avoir sublimé cette bière pour en faire un breuvage atypique à ne pas manquer. Pour rappel, la bière Epiclèse est disponible à la livraison sur leur site.
Alain de Bouvère
