Le brasseur italien Roberto Orano symbolise parfaitement l'amour de la Belgique et de l'Italie. Nous fêtons d'ailleurs les 75 ans du début de l'immigration italienne vers notre plat pays en cette année 2021 et la fière équipe nationale italienne vient de remporter l'EURO! Mais le fondateur de la microbrasserie White Pony se montre discret, comme beaucoup de nos amis d'origine italienne qui possèdent pourtant un talent énorme et une passion communicative. Notre première découverte des bières de White Pony remonte d'ailleurs à un de nos premiers festivals brassicoles, à Bruges, avec la surprise de découvrir un petit stand d'une brasserie italienne dans un événement aux participants exclusivement belges. Les bières, également atypiques, nous ont marqué... Et plusieurs années plus tard, nous avons enfin eu la chance de pouvoir poser quelques questions à leur maestro: Roberto Orano.
Comment est apparue votre passion pour la bière artisanale?
Roberto Orano: "Il faut vraiment revenir en arrière, à mon adolescence, quand je buvais des bières industrielles (ici, en Italie, c'était dur de trouver autre chose il y a plusieurs années). Puis à mes 18 ans, j'ai suivi un adage de mon père (né en Belgique) qui prétendait que les bières belges étaient les meilleures... Du coup, après quelques voyages familiaux et quelques visites de brasseries en Belgique, j'ai commencé à étudier la théorie du brassage par moi-même avant de me lancer dans le brassage amateur. Avec du grain et du matériel (en partie fabriqué par mes soins), j'ai donc débuté en brassant à la maison dans des cuves de seulement cinq litres... ce fut vraiment le début de l'aventure White Pony."
Quand avez-vous réellement lancé White Pony Brewery ?
Roberto Orano : "En 2012, je me suis retrouvé sans-emploi et avec seulement 2000€ sur mon compte en banque. J'effectuais des petits jobs pour gagner de quoi vivre au quotidien mais je n'arrivais pas à trouver un bon boulot. Plusieurs personnes complimentaient mes bières brassées chez moi. J'ai du coup décidé en 2013 d'investir l'argent qu'il me restait dans un brassin de 10 hectolitres de ma bière The Oracle (ma toute première recette). Ce premier brassin fut vendu en une semaine et j'ai réinvesti l'argent récolté pour recommencer... en boucle pendant une année. Sans mettre un sou de côté pour moi, je n'avais pas de quoi m'offrir une pizza..."
Pourquoi avoir décidé de brasser en Belgique?
Roberto Orano: "J'ai choisi de brasser en Belgique car mon père y est né, qu'une partie de ma famille y vit actuellement et que mes racines brassicoles y sont apparues et sont certainement belges. Je pourrais brasser n'importe où mais ça ne serait pas pareil... Il faut pouvoir rendre hommage à ses racines et la culture qui a fait naître votre passion. L'entièreté de notre production est en Belgique ainsi que notre entrepôt pour les exportations qui se situe à Anvers. La salle de vieillissement pour les fûts de chêne et la nouvelle pièce pour les bières acides sont toutes deux situées dans la brasserie Eutropius où nous produisons à façon toutes nos bières depuis 2019. En Italie, j'ai uniquement le White Pony Pub, le magasin en ligne et mon bureau administratif."
Comment décririez-vous les bières de White Pony?
Roberto Orano: "Différentes de la demande (vous savez, la plupart des brasseries répondent aux attentes de la mode du moment), folles et remplie de passion et d'émotions. Chaque étiquette revêt une signification sociale, avec parfois de la poésie et souvent des liens avec des albums musicaux ou d'autres formes d'arts."
Quels sont vos projets pour le futur et peut-on espérer vous croiser bientôt en Belgique?
Roberto Orano : "Bien sur, j'ai planifié un voyage cet été malgré les difficultés du COVID-19. En plus, je vais embouteiller au mois de novembre ma nouvelle bière: la Get the funk out of my life (une Sour Ale vieillie trois ans en fûts bordelais avec différentes souches de Brettanomyces et un ajout de cassis). Ensuite, je brasserai une Oud Bruin qui remplira à nouveau ces fûts. On a aussi pas mal de nouvelles bières qui sortent dans les prochaines semaines: certaines vieillies en fûts, un nouvel Imperial Stout (A wish full of dreams) et d'autres retours comme la Teppistenbier (notre quadruple). Mon plus gros projet actuel est de m'occuper de la salle de maturation des bières acides où nous comptons faire vieillir en fût pas moins de douze bières aux fruits etc. On sortira cette gamme sous la forme d'un concept, avec une histoire divisée en actes et chapitres, chaque bière composant la trame commune qui sera divisée en quatre périodes. On a engagé un artiste pour réaliser toutes les étiquettes en lien avec l'histoire et je suis vraiment excité et un peu stressé par la sortie de cette gamme."