Rochefort triple extra - Vol. Alcool : 8,1%
Le pitch:
Le monde trappiste est en ébullition depuis quelques mois. Alors qu'"Achel" perd son appellation trappiste, "Rochefort" étoffe sa gamme intemporelle de bières avec une triple clairement inattendue. Il a donc fallu attendre plus de 65 ans avant que les moines ne produisent une nouvelle bière (la dernière en date étant la Rochefort 8), et blonde de surcroit. En effet, leurs trois bières précédentes mieux connues sous le nom de Rochefort 6,8 et 10 étaient respectivement ambrée et brunes. Cette triple permet donc de se démarquer ostensiblement. Autre changement, les consommateurs de Rochefort auraient pu s'attendre à voir un chiffre trôner au beau milieu de l'étiquette, rappelant ainsi l'ancienne mesure exprimé en degrés Baumés (La Rochefort 10 équivaut donc à 10°Bé). Cet indicateur qui servait à mesurer la quantité de sucre présent dans le moût avant fermentation ne fût utilisé qu'avant 1993, date à laquelle les normes imposées par l'union européenne l'ont remplacé par l'actuel degré Plato (°P). Il est donc normal de voir un logo "triple" sur fond violet siéger sur le devant de l'étiquette. La suite de l'appellation "extra" n'est finalement qu'un hommage centenaire à leur première bière "blonde extra" produite en 1920. La bière a, évidemment, été brassée dans le respect de la tradition monacale, avec une souche de levure qui leur est propre et une eau de brassage pure qui sort tout droit de la source Tridaine aux abords de la brasserie. On peut également noter une adjonction d'épices et d'écorces d'orange pour sublimer la dégustation.
La dégustation:
Dès le versement du liquide, une mousse ivoire et abondante envahit le verre. Dense et tenace, elle se ratatine légèrement en dentelles pour exhiber une robe dorée/orangée brumeuse et rayonnante. On peut apercevoir de fugaces micro-bulles près de la surface, ce qui est déjà une indication sur sa pétillance. Mis à part une base céréalière solide, l'inauguration olfactive nous mène sur des parfums d'orange, de marmelade, de mandarine et de prune verte, ce qui rend l'ensemble finalement assez doux, comme une confiserie. Le houblon est logiquement en retrait avec une subtile note fleurie et herbeuse. La progression odorante est ensuite plus levurée, avec de légers esters fruités de poire, de banane (un minimum, ouf!) ou encore d'abricot. Le départ gustatif débute amplement, mais sans lourdeur, avec un parfait dialogue entre malt et houblons. Les saveurs fleuries de miel, de pamplemousse et de zestes d'orange se démarquent pour mener vers une amertume verte et d'agrumes bien ressentie. C'est raisonnablement effervescent (par rapport à la moyenne des triples), la texture est légèrement farineuse et moelleuse avec une douceur qui se mêle à l'alcool tout en finesse. Certes, c'est sucré, mais loin d'être écœurant. Les codes de la triple classique sont bousculés avec cette "Rochefort" qui se différencie par une bonne balance des matières premières pour mettre en avant une complexité plus affirmée.
Alain De Bouvère