Nous avons eu la chance de poser quelques questions à Morane Le Hiress, brasseuse et cofondatrice de Janine : brasserie-boulangerie basée dans la CoHop de Bruxelles.
Pouvez-vous expliquer votre parcours avant d'en arriver à gérer la brasserie Janine ?
Morane Le Hiress : "J'ai obtenu un doctorat en biologie avant d'occuper une fonction de chercheuse dans un laboratoire de développement médical. En 2018, mon beau-frère m'a offert un atelier de quatre heures pour apprendre le brassage de la bière. Comme beaucoup, ce fut le point de départ de ma passion pour la bière. J'ai ensuite commencé à brasser en amatrice dans ma cuisine avec des casseroles comme tout le monde. L'idée de reconversion professionnelle et de lancer une brasserie est apparue en 2019, juste avant le début de la pandémie du Covid-19."
Quelle est l'histoire derrière la création de la brasserie et boulangerie Janine ?
Morane Le Hiress : "Mon compagnon est boulanger et mon beau-frère se demandait aussi comment allier travail et passion. On se posait pas mal de questions, après nos recherches, sur les liens entre la bière et le pain dans le passé par exemple, ou sur le gaspillage alimentaire (le pain représente 20% de sa totalité en Belgique), sur l'usage de pain à la place du malt dans nos recettes... Nous avons donc décidé de joindre nos forces et de lancer un projet familial en ouvrant notre boulangerie et notre brasserie au sein de la CoHop."
Le projet Janine est d'ailleurs décrit ainsi officiellement : Janine est une boulangerie et une brasserie qui vise à réintroduire dans son cycle de production les résidus de chaque activité : des pains à partir de drêches et de levure de bière et des bières à partir de pains invendus, le tout dans une démarche artisanale et locale. Janine est donc à la fois au four et au moulin : elle casse la croûte le jour et se coule des mousses la nuit, toujours dans un esprit rassembleur. Elle le fait pour l’amour des siens, des femmes et des hommes qu’elle aime, qui l’inspire, à qui elle souhaite donner le plaisir simple d’une bonne bière, et d’un pain à la mie bien moelleuse qui fait du bien au cœur comme à la Terre!
Quelle est votre structure actuelle et votre capacité de production ?
Morane Le Hiress : "Je suis la cheffe brasseuse et je gère l'aspect brasserie de A à Z. Des recettes, à la production, au nettoyage, aux emballages et jusqu'aux ventes et aux livraisons. Les recettes sont issues de mon envie personnelle et de mes essais, en s'articulant autour de trois styles : les IPA, les noires et les acides. Pour le reste de l'entreprise, nous sommes donc trois cofondateurs et administrateurs et nous employons une dizaine d'ouvriers et de vendeurs pour la boulangerie. Nous la production brassicole, nous sommes en pleine pente ascendante vers notre objectif de production à 100% : 40 hectolitres par mois soit 480 par an. Actuellement, nous en sommes environ à 2/3 de cette capacité de production."
Cette question s'inscrit dans la lignée de la journée du 8 mars : avez-vous déjà ressenti des formes de sexisme depuis que vous êtes brasseuse ?
Morane Le Hiress : "Directement, non. Quand les gens réagissent en me rencontrant, pour ceux qui sont étonnés, ça va plutôt dans le bon sens : ils sont d'abord curieux puis contents de voir que le métier s'ouvre enfin. Mais j'ai déjà ressenti des réactions inverses, négatives, avec des personnes qui clairement ne voulaient pas goûter mes bières en se disant qu'une femme ne pouvait pas brasser quelque chose d'intéressant."