KLAAK

Klaak : une marque de bière française sexiste provoque l'indignation

En France, l'apparition d'une gamme de bières, sous le sobriquet de "la Klaak" (NDLR : la claque), a provoqué un véritable tollé à cause de ses étiquettes et de ses descriptifs sexistes. Si nous avons d'abord décidé de ne pas parler de cette marque à façon (des bières brassées via contrat à la Brasserie des 3 clochers au sud de Lille), les réactions françaises méritent de s'attarder sur le sujet.

Début 2023, une nouvelle marque de bières apparaît sur la toile du web. Trois bières brassées par une bande de copains, dans le nord de la France, avec les poncifs du genre : une triple comme introduction de la gamme, une "blonde légère" et une ambrée. Pas de quoi provoquer le moindre froncement de sourcil chez les amateurs de bières artisanales, surtout que le projet est à façon. Par contre, le choix des étiquettes ainsi que les descriptions des bières suscitèrent une indignation visiblement partagée par bon nombre de professionnels du secteur brassicole en France comme en Belgique.

L'étiquette montre un moine giflant avec force une femme. Pourquoi un moine ? Sans doute pour encore plus rentrer dans le cliché du marketing de la bière des années 1990. Pourquoi de la violence envers les femmes ? D'après les créateurs de la marque, pour signifier que pour se respecter (le slogan est "respecte-toi"), il fallait ne pas boire de mauvaise bière industrielle (la femme représentée est donc la consommatrice fautive).

Très rapidement, la Klaak voit ses étiquettes visibles sur le site web modifiées pour ne montrer qu'un gros-plan sur la figure du moine. Qui des rouleaux d'étiquettes que les plus attentifs auront pu apercevoir en photo sur les réseaux sociaux (avant un grand nettoyage de la marque des publications trop critiquées) ? Mystère... La bande de copains derrière le projet s'excusent platement et se justifient en trouvant les excuses classiques souvent reprises dans le bingo antisexisme : « on n’a pas compris », « nos femmes cautionnent », « nous sommes des pères de famille ». Ou comment avouer à demi-mot ne jamais avoir fait d'études de marché, consulté des professionnels du secteur ou lu les différents dossiers et articles sur le sujet de la lutte contre les discriminations dans le monde brassicole.

Pire, les descriptifs des KLAAK n'ont (à l'heure d'écrire ces lignes) pas encore été changées. Donc, les créateurs de la gamme valident bien qu'ils ne voient aucun problème dans des textes comme "Le charme du métissage. Sa rondeur et sa jolie couleur dorée donnent envie de se resservir" pour décrire la bière ambrée. Pourtant, ce texte court compile une comparaison sexiste entre la bière et la femme, ainsi qu'une connotation raciste du temps des colonies.

Par contre, le secteur professionnel français a décidé de réagir puisque le syndicat national des brasseries indépendantes (SNBI) a exclu la Brasserie des 3 clochers de son association syndicale pour respecter une charte interne établie en 2019. Cependant, d'après les informations recueillies en interview par nos confrères de Happy Beer Time, l'exclusion de la brasserie serait surtout justifiée par le non-paiement des cotisations d'affiliation de la brasserie incriminée. De quoi poser question sur la vigilance et le respect des normes pourtant créées en interne au SNBI.

Dans la même semaine, le journal The Guardian relevait des rapports alarmants sur le sexisme en France. Un rapport annuel 2023 du haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) indique en effet que la situation empire en France, particulièrement contre les jeunes femmes. Sur 2.500 femmes sondées, la catégorie d'âge entre 18 et 24 ans indique par exemple que 22% (soit quasi une femme sur quatre) d'entre-elles a subit une forme de contrôle psychologique du partenaire, 15% une forme de violence physique. 37% des femmes interrogées (plus d'une sur trois) indiquent avoir subi du sexe non-consenti... Pire, le viol concerne 22% des sondées de la catégorie des 18-24 ans.

Ces statistiques interpellantes montrent que la situation reste hautement problématique dans nos pays et des communications comme celle de la KLAAK renforcent indirectement ces violences.

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