Avaucia - Vol. Alcool: 5,5%
Pitch :
Le couple qui se cache derrière la microbrasserie wallonne Hepta partage également une passion communicative pour l'histoire et l'archéologie expérimentale via leur association Ludotium (très active cet été). De quoi nous combler de bonheur pour nos séances sur le sujet lorsque nous cherchons des styles ou des interprétations de bières (très) anciennes. Cette Avaucia tombe à pic en nous emmenant dans notre passé protohistorique celte avec une interprétation d'une recette gauloise vieille de 2000 ans environ. La pièce de monnaie sur l'étiquette nous provient du peuple des Atuatiques, derniers Gaulois de Belgique (aux alentours de la Sambre et Meuse) à se soumettre à Jules César.
L'Avaucia est une bière blonde fermentée et refermentée avec du miel milles fleurs de Wallonie, de style korma, corma, courma ou encore curmi... Suivant les historiens de l'époque (donc attention : souvent Romains, ils ne sont pas objectifs par rapport à la bière), il s'agit d'une décoction de blé et de froment même si d'autres traductions parlent plutôt d'orge. “(…) Ce qu’on boit chez les riches, c’est du vin apporté d’Italie ou du pays des Massaliètes, et on le boit pur ; quelquefois pourtant on y mêle un peu d’eau ; dans les classes inférieures, d’autres part, c’est une préparation faite de décoction d’orge (zuthos) avec du miel, que la plupart consomment pure : on l’appelle corma. Ils avalent petit à petit, à la même coupe, et pas plus d’un cyathe ; mais ils y reviennent souvent. (…)”, nous indique la traduction de A. marangou du texte Histoires - Deipsonophistes IV de l'auteur Posidonios d'Apamée au deuxième siècle de notre ère.
Au niveau du brassage, l'interprétation des brasseurs mènent vers un concassage moderne d'orge Pilsen puis une chauffe dans un four en brique et torchis avec du feu de bois pendant deux heures. La filtration est opérée via un panier en osier renforcé par de la paille de blé. Deux kilos de miel sont ensuite versés pendant l'ébullition qui dure une heure au total. Finalement, les 30 litres obtenus sont mis en tonneau de chêne avec un ensemencement naturel usant une bonde ouverte (un morceau de lin qui recouvre le liquide).
Dégustation :
Service d'abord au verre pour observer la robe de cette Avaucia qui se pare d'orange avec une opacité qui laisse néanmoins la lumière filtrer pour rendre l'ensemble très agréable à l'œil. Derrière ce léger voile de mystère, quelques fines bulles viennent égayer la bière qui ne se dote pas d'une mousse blanche (nous en avions eu lors d'une dégustation plus ancienne). Le nez, ouvert et complexe, porte des aromes de sucre brun, de levures sauvages, de fruits jaunes frais, de fleurs, d'épices blanches avec des notes de bois et de cuir. Voilà déjà de quoi largement nous intriguer !
En bouche, l'attaque porte une dualité de la douceur soyeuse du miel avec une acidité tranchée presque citrique qui ne domine pas. Une pétillance fine s'installe et complète la panoplie nécessaire pour éviter que l'usage du miel ne colle au palais. La dégustation dégage des notes de marmelade d'orange, de miel avec des tanins secs bien présents en finale pour terminer de rincer notre bouche. Notons un équilibre maîtrisé et très agréable mais une forte évolution possible de l'Avaucia en fonction de son âge.
Enfin, nous avons également dégusté cette bière dans un petit gobelet en céramique à la celte. La sucrosité y prédomine avec une acidité citrique plus légère. Des notes de nectarine juteuse, de bonbon et de Brett s'ajoutent à la découverte gustative.
